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Réaction - Evasion Fiscale

Arrestation de Carlos Ghosn : Eric Bocquet demande la démission du PDG de Renault

Lundi 19 novembre 2018, Carlos Ghosn, Président Directeur Général de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, était arrêté au Japon, où il est soupçonné d’avoir dissimulé une partie de ses revenus au fisc japonais. Suite à cette annonce, la presse a sollicité Eric Bocquet, en tant que rapporteur d’une commission d’enquête sur la fraude fiscale. Vous retrouverez l’ensemble de ses interventions dans la presse ci-dessous. La première intervention a eu lieu sur la chaine Public Sénat, lundi 19 novembre.

Carlos Ghosn : « Il faut agir de manière spectaculaire pour mettre fin à ce scandale » selon Eric Bocquet

Eric Bocquet, sénateur communiste du Nord, vice-président de la commission des finances et spécialiste de l’évasion fiscale, réagit à l’arrestation de Carlos Ghosn au Japon, soupçonné de fraude fiscale. Par Marion D’Hondt Carlos Ghosn, PDG de Renault-Nissan et un des plus grands patrons d’industrie au monde, a été arrêté au Tokyo, accusé de malversations par la justice après une enquête interne. Le grand patron aurait « déclaré des revenus inférieurs au montant réel pendant des années » selon le rapport, ainsi que « de nombreuses autres malversations, telles que l’utilisation des biens de l’entreprise à des fins personnelles ». Le conseil d’administration prévoit de le démettre de ses fonctions. Eric Bocquet estime que « la question de la démission se pose ». Il considère que « les Japonais ont été hyper réactifs » et que, si l’affaire a éclaté, c’est qu’ils avaient « des éléments conséquents ». Pour revenir sur la formule d’Emmanuel Macron, qui s’était déclaré vigilant sur la situation de Renault, il conseille de « dépasser le stade de la vigilance et agir de manière spectaculaire ». Pour lui, il est clair que « les Japonais ont des éléments probants » qui doivent amener à une saisie de la justice française. Il n’est toutefois pas étonné, considérant cette affaire comme « un cas de plus ». « C’est la goutte de carburant qui fait déborder le vase du mécontentement » Il met en parallèle « deux mondes différents : celui des gilets jaunes, qui veulent un peu plus d’argent pour vivre un peu moins mal et celui des PDG, qui ont vu leur rémunération augmenter de 14 % ». Le sénateur communiste considère qu’il y a « un problème de répartition de la richesse » dans le pays, entre « des rémunérations stratosphériques à 34 000 € par jour pour Carlos Ghosn et, de l’autre côté, la pauvreté ». Pour lui, le malaise en France est « très profond » et les choses ne peuvent pas continuer ainsi. Il déclare que la hausse du prix du diesel est « la goutte de carburant qui fait déborder le vase du mécontentement ». Le gouvernement a mis du temps à réagir et « aurait tort de sous-estimer ce qu’il se passe ». Il considère que « le gouvernement n’est pas sourd mais autiste » face aux problèmes des Français. Le pouvoir « communique beaucoup mais n’agit pas ». Il est dans « un tango du nouveau monde ; deux pas en avant et trois en arrière ». Il a l’impression que le gouvernement Philippe « donne d’une main pour reprendre de l’autre ». Les mesures annoncées sont des « mesurettes périphériques » qui « ne posent pas les questions de fond ». Par exemple, changer de voiture suppose d’« avoir un salaire pour pouvoir le faire, pour pouvoir emprunter à la banque », ce qui impose de « poser la question des salaires et du niveau des retraites dans ce pays ». ----- Dans l’Humanité, un article entier est consacré à l’arrestation de Carlos Ghosn, avec le décryptage d’Eric Bocquet.

ÉRIC BOCQUET « LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE FISCALE EST INSUFFISANTE EN FRANCE »

Mardi, 20 Novembre, 2018 par Aurélien Soucheyre Le sénateur PCF Éric Bocquet, rapporteur d’une commission d’enquête sur la fraude fiscale, réagit à l’arrestation de Carlos Ghosn au Japon. Que pensez-vous de cette arrestation ? Je note une accélération des révélations. On s’était habitué à un scandale par an. On est passé à un scandale par semaine. Il y a eu les Panama et les Paradise Papers, les Lux, Offshore et Football Leaks ces dernières années. La semaine passée, on a entendu parler du joueur de Chelsea N’Golo Kanté qui a fort heureusement refusé de se faire payer une partie de son salaire via un trust implanté à Jersey. Cette semaine, c’est encore plus impressionnant avec l’arrestation de Carlos Ghosn, que l’on pouvait imaginer intouchable. On peut se demander qui sera le prochain. Le sujet devient incontournable dans le débat public, grâce aux ONG, aux lanceurs d’alerte, aux journalistes d’investigation et aux travaux parlementaires. Tout cela alimente une prise de conscience et une vigilance accrue. Mais la lutte contre la fraude fiscale est insuffisante en France. Macron a assuré qu’il serait « vigilant » à la « stabilité » de Renault… Il y a là un décalage saisissant. Si les autorités japonaises ont procédé à l’arrestation spectaculaire d’un PDG de ce calibre, j’imagine qu’elles ont un dossier solide et qu’elles ne s’amusent pas. L’État français, qui détient des capitaux dans la holding Renault-Nissan, ferait bien de réclamer la démission de Ghosn et de se pencher avec sérieux sur la situation fiscale de ce groupe et son dirigeant. Cette holding a d’ailleurs son siège aux Pays-Bas. Pourquoi ? Des raisons fiscales ? Ghosn a reçu 13 millions d’euros en tant que PDG en 2017. Qu’en pensez-vous ? C’est indécent. Rien ne justifie qu’un dirigeant puisse gagner 300 fois plus que le salarié le moins bien payé d’une entreprise. C’est pourquoi les parlementaires PCF défendent une échelle des salaires de 1 à 20, qui permettrait d’encadrer et de limiter les écarts. N’oublions pas que les revenus des PDG du CAC 40 ont augmenté de 14 % en une année, quand le montant des fortunes accumulées a connu une hausse de 30 %. Il ne s’agit pas du premier grand patron soupçonné de fraude fiscale… En France, Arnault, Pinault et Dassault ont déjà été pointés pour leurs pratiques « d’optimisation ». La fraude, l’évasion ou l’évitement fiscal sont au cœur de la machine capitaliste. L’idée est d’accumuler des sommes considérables et d’échapper à l’impôt pour participer le moins possible au fonctionnement de la société. En France, le coût est estimé à cent milliards d’euros par an, soit plus que notre déficit. C’est insupportable. Et c’est la preuve que ceux qui répètent qu’il n’y a plus d’argent, que la dette vient de la dépense publique et qu’il faut s’imposer des sacrifices, travailler plus longtemps et se soigner moins nous abusent. Les sanctions et la volonté politique sont-elles suffisantes en France ? À l’évidence non. La dernière loi anti-fraude proposée par le ministre des Comptes publics ne va pas assez loin. Le plaider-coupable permet à une banque ou une entreprise de reconnaître sa responsabilité et de faire un petit chèque pour ne pas aller en justice. Il faudrait des lois beaucoup plus répressives, et plus de moyens : Gérald Darmanin fait grand cas de sa nouvelle police fiscale forte d’une quinzaine de postes, mais la direction générale des finances publiques va encore perdre plus de 2 000 postes l’an prochain. ----- Article France 3 Hauts-de-France Par Quentin Vasseur

Pour le sénateur nordiste Éric Bocquet, l’État doit exiger la démission du PDG de Renault Carlos Ghosn

Le sénateur communiste du Nord Éric Bocquet s’est exprimé dans les colonnes de L’Humanité sur l’arrestation du patron de Renault au Japon. "L’État français actionnaire de Renault doit demander la démission du PDG Carlos Ghosn, accusé de malversations par la justice japonaise et arrêté lundi", réclame mardi le sénateur PCF Eric Bocquet, rapporteur d’une commission d’enquête sur la fraude fiscale. Alors qu’Emmanuel Macron a indiqué lundi que l’État serait "extrêmement vigilant" à "la stabilité" du constructeur automobile français et à l’avenir de son alliance avec Nissan, M. Bocquet juge dans un entretien à L’Humanité qu’"il y a là un décalage saisissant" avec les autorités japonaises. "J’imagine que [les Japonais] ont un dossier solide" "Si les autorités japonaises ont procédé à l’arrestation spectaculaire d’un PDG de ce calibre, j’imagine qu’elles ont un dossier solide et qu’elles ne s’amusent pas", note-t-il. "L’État français, qui détient des capitaux dans la holding de Renault Nissan, ferait bien de réclamer la démission de Ghosn et de se pencher avec sérieux sur la situation fiscale de ce groupe et son dirigeant. Cette holding a d’ailleurs son siège aux Pays-Bas. Pourquoi ? Des raisons fiscales ?", s’interroge-t-il. Le conseil d’administration de Nissan doit se prononcer jeudi sur le limogeage de son président Carlos Ghosn, et Mitsubishi Motors (MMC) a annoncé une décision similaire. Renault a indiqué de son côté que son conseil d’administration "se réunira au plus vite". -----

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