Interviews

Réforme de la carte judiciaire

Nos sénateurs continuent de s’engager pour maintenir la justice à proximité des citoyens

Michelle Gréaume et Eric Bocquet sont engagés de longue date pour maintenir en service les tribunaux d’instance de proximité, comme celui de Cambrai.

Ils avaient d’ailleurs rencontrés le bâtonnier et le Président du Tribunal d’instance de Cambrai en décembre à ce sujet : http://senateurs.lhumaindabord.fr/actualite/article/premiere-journee-de-rencontres-et-d-echanges-pour-les-senateurs-de-l-humain-d

Ce lundi, Eric Bocquet s’est rendu à Douai lundi pour assister à une réunion pour informer sur la réforme de la carte judiciaire, comme le relate la Voix du Nord :

Crédit photo : Eric Bocquet

Les professionnels de la justice unis contre la réforme

Côte à côte, des représentants de toutes les professions de la justice ont dénoncé, lundi soir à l’hôtel de ville de Douai, le projet de loi présenté par le Premier ministre et la garde des Sceaux. Il est question du manque de moyens, bien sûr, mais pas seulement : « C’est le justiciable qui va souffrir ! »

Éric Dussart | 13/03/2018

« Cause commune ! » Alain Cockenpot, bâtonnier de l’ordre des avocats de Douai, a lancé ces deux mots comme s’il s’agissait d’un slogan. C’était en tout cas une réalité : côte à côte, avocats, magistrats, greffiers et agents administratifs ont rivalisé de critiques – plus dures les unes que les autres –, d’exemples illustrant les raisons de leur colère, et de mises en garde, aussi : « C’est la Justice qui souffre, avec les mesures qu’on nous annonce, donc les justiciables. »

« Le pire texte que j’aie jamais vu. Pire que celui de Rachida Dati, pire que celui de Christiane Taubira. »
D’où l’idée de cette réunion publique, destinée à informer du recul que voient en commun les professions de justice dans le texte annoncé par Nicole Belloubet, garde des Sceaux, et le Premier ministre Édouard Philippe, vendredi dernier. « Le pire texte que j’aie jamais vu, dit Me Alain Reisenthel. Pire que celui de Rachida Dati, pire que celui de Christiane Taubira. Un texte sournois, inhumain, inaccessible. »

Une véritable charge. Au fil de leur intervention, ils ont évoqué la numérisation des procédures, « qui va encore creuser le fossé avec les plus démunis, puisque 17% au moins des Français n’ont pas accès à Internet », la réforme de la procédure pénale, « qui facilitera le travail de la police, du parquet, mais qui ne parle pas de la défense », ou l’idée de créer des tribunaux criminels, « qui trahit une véritable défiance à l’égard des citoyens ».

Sans moyens

Et encore l’organisation territoriale de la justice (fusion des tribunaux de grande instance et d’instance), qui reste encore bien floue, ou les mesures sensées donner du sens à la peine… tout cela évidemment sans moyens supplémentaires, ou presque. « Je m’interroge sur cette justice de qualité que le gouvernement nous dit vouloir installer », dit Sabine Mariette, représentant le Syndicat de la magistrature. Le constat est double, en fait : « Aujourd’hui, la justice n’a plus les moyens d’assurer le service public qu’elle doit aux cioyens », pour Alain Cockenpot ; « et avec le texte qu’on nous propose, ce sera bien pire », enchaîne Christian Bouzigues, qui s’exprimait au nom de l’Union syndicale des magistrats.

« On a pourtant tous envie de travailler au service du justiciable. »

Celui-ci a rappelé les chiffres de la misère de la Justice et dénonçé, comme tous les autres, « une concertation en trompe l’œil ». Bref, cette démarche unitaire a mille raisons d’être, dont la moins touchante n’est certainement pas le récit sensible, manifestement sincère et un peu désespéré de Michel Carrier, pour la CGT des agents administratifs, de ses conditions de travail au TGI de Douai. « On a pourtant tous envie de travailler au service du justiciable », conclut-il. Dans des conditions pénibles, hélas.

Un article à retrouver ici


Michelle Gréaume a été interrogée par la Voix du Nord pour ce qui concerne l’arrondissement du Valenciennois, suite aux annonces de la Ministre de la Justice, qu’elle avait interrogée au Sénat sur le sujet.

Réforme judiciaire, « il faut rester vigilant »

Aucun TGI ne devrait être supprimé. Ceci dit, la réforme judiciaire aura bien lieu. De quoi laisser nos élues du Valenciennois avec plusieurs interrogations.

Diane Lenglet | 13/03/2018

Ce vendredi 9 mars, la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, et le Premier ministre, Édouard Philippe, ont dévoilé les axes de la réforme de la justice, un dossier tout particulièrement suivi par nos deux sénatrices.

Michelle Gréaume (groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste) avait posé une question écrite, le 1er mars, sur les conséquences de ce bouleversement et la crainte de voir « éloigner les citoyens des lieux de justice de proximité, aboutissant même à la création de déserts juridiques avec les conséquences économiques et sociales non négligeables ».

La crainte initiale était que les trois tribunaux de grande instance du Hainaut viennent à perdre le gros de leurs compétences au profit d’un seul « grand » tribunal départemental. Valenciennes, Cambrai, Avesnes auraient alors récupéré les affaires jugées plus petites ; les autres étant renvoyées à Lille.

« Si la volonté d’une justice plus efficace est louable, il faut rester vigilant »

Depuis vendredi, Valérie Létard (UDI-Union Centriste), qui avait porté ses inquiétudes au ministère, se dit soulagée. Aucun tribunal de grande instance ne devrait être sacrifié, la spécificité de notre région et de notre bassin de vie ayant été pris en compte. « La mobilisation a fini par payer, se félicite-t-elle. Cela montre que le besoin de proximité a été entendu. » Reste que le texte de loi, qui sera présenté le 5 avril, est encore empreint d’incertitudes. Valenciennes sera tout particulièrement concernée par la fusion du tribunal d’instance et celui de grande instance. Comment les TGI, au fonctionnement redéfini par « spécialités », vont-ils s’organiser ? « Nous ne savons pas, concrètement, les impacts de cette réforme. »

Michelle Gréaume est tout autant circonspecte : « Cette réforme aura un coût. Sera-t-elle plus efficace ? N’aurait-il pas été préférable de donner davantage de moyens humains et financiers aux juridictions ? ».

Retrouvez cet article ici


Michelle Gréaume et Eric Bocquet ont donc décidé d’écrire un courrier à Madame Nicole BELLOUBET, Ministre de la Justice, que vous pouvez consulter ci-dessous :

Madame la Ministre,

Nous nous adressons à vous pour relayer les vives inquiétudes liées aux « Chantiers de la Justice », que vous portez depuis plusieurs mois maintenant, et en particulier sur la réorganisation de la carte judiciaire.

Les magistrats, les greffiers et les avocats, soutenus par de nombreux élus locaux de sensibilités diverses, se sont mobilisés dans leur grande diversité, dans le cadre d’un mouvement national et unitaire, pour dénoncer les contours extrêmement flous de ce projet et une consultation insuffisante.

Nous partageons leurs craintes que, sous couvert de simplification des procédures et du désengorgement des tribunaux notamment, ce nouveau maillage juridictionnel ne se traduise par une désorganisation du fonctionnement quotidien de la justice et des bouleversements importants pour les justiciables, avec notamment une aide juridictionnelle plus limitée ou encore l’éloignement des lieux de justice.

L’engagement verbal qu’aucun tribunal d’instance ne serait fermé, n’est pas suffisant pour lever nos inquiétudes. La création d’un tribunal de première instance par département s’accompagne de la transformation des tribunaux d’instance en chambres détachées aux compétences réduites. Or nous savons d’expérience que toute fermeture de juridiction, toute restriction des compétences se sont toujours traduites par une diminution d’une part des contentieux.

Vider un service de sa substance et de ses compétences est une autre façon de le fermer. Les exemples de la Poste ou encore des hôpitaux de proximité en témoignent.

A chaque fois ce sont les territoires ruraux et leurs habitants qui en subissent le plus les conséquences, eux qui souffrent pourtant déjà assez de la logique de métropolisation à marche forcée qui se dessine depuis plusieurs décennies maintenant.

Plus encore dans un département comme le Nord qui s’étend sur plus de 5700 km2, compte plus de 2,6 millions habitants dont une grande partie est confrontée à d’importantes difficultés sociales, constituant, nous le savons, un obstacle à l’accès à la justice que ce soit au plan des moyens financiers que de la mobilité.

Nous considérons, pour notre part, que dans une République une et indivisible, chaque citoyen doit avoir droit à un égal accès à la justice, qu’il vive dans un territoire urbain ou rural.

Les réformes à venir s’apparentent malheureusement plus à une gestion de la pénurie, et à l’adaptation de l’institution judiciaire au sous-investissement qu’aux nécessaires soucis de simplification, d’efficacité et de lisibilité, qui impliquent une augmentation substantielle des moyens accordés à la justice.

C’est pourquoi, nous vous invitons à entendre, écouter, et prendre en compte les avis et remarques qui s’expriment, ce qui suppose de prendre le temps d’une réelle concertation avec tous les intéressés.

Veuillez agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre haute considération.

Éric Bocquet Michelle Gréaume

Sénateur du Nord Sénatrice du Nord

Imprimer cet article

Sur le même sujet

Services publics

Au sénat

Dans le Nord

Dernière vidéo

Fabien Gay - PJL Accord économique et commercial UE - Canada - Intervention générale - 21-03-24 En savoir plus

En direct

Une question ?