Questions au gouvernement

Question d'actualité au Gouvernement

Eric Bocquet dénonce la demande de Vinci de faire payer aux usagers les péages rendus gratuits

Et fait renoncer Vinci !

Ce mardi 18 décembre 2018, Eric Bocquet posait la question d’actualité au Gouvernement, qui portait sur la demande de Vinci de faire payer aux usagers les péages rendus gratuits lors des actions des Gilets Jaunes.

Quelques minutes après qu’il ait posé cette question, Vinci annonçait officiellement qu’il renonçait à cette procédure de remboursement.

Question d’Eric Bocquet :

Monsieur le président,
Mesdames, Messieurs les ministres,
Mes chers collègues,

Ma question s’adresse à Mme la ministre chargée des transports.

L’opérateur Vinci Autoroutes veut demander la régularisation des paiements des péages autoroutiers dont les automobilistes n’ont pas pu s’acquitter lors des opérations « péages gratuits » menées par le mouvement des « gilets jaunes » depuis le 17 novembre dernier.

Cette initiative est tout simplement inacceptable.

Je veux, à ce stade, rappeler quelques chiffres éloquents. Pour l’année 2017, dernières données disponibles, le groupe Vinci Autoroutes a réalisé un chiffre d’affaires de 4,3 milliards d’euros, en hausse de 3,4 % par rapport à 2016, pour des recettes de péage approchant les 3 milliards d’euros, dégageant un résultat net de 1,1 milliard d’euros.

Quant à l’investissement sur l’année, il pointait à 537 millions d’euros, en baisse de 11,2 % par rapport à l’exercice précédent. Mme la ministre, quelle est la position du Gouvernement sur cette démarche du groupe autoroutier ?

(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

Réponse de Mme la ministre, auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Monsieur le président,
Mesdames, Messieurs les sénateurs,
Monsieur le sénateur Bocquet,

J’ai effectivement pris connaissance de l’intention de certaines sociétés concessionnaires d’engager des procédures de recouvrement auprès des automobilistes qui n’ont pas pu acquitter leurs péages du fait de blocages ou de dégradations d’installations.

Je le dis fermement, cette annonce est totalement inopportune et inappropriée. Dans la situation que connaît notre pays, chacun doit jouer son rôle pour contribuer à l’apaisement.

Par ailleurs, tout indique que cette décision ne serait pas fondée sur le plan juridique. En effet, les images de vidéoprotection n’ont pas vocation à être utilisées pour la régularisation des paiements.

J’ai donc demandé aux sociétés concessionnaires de se conformer strictement à la loi et de ne pas mettre en œuvre de tels recouvrements. Je les recevrai ce soir afin de faire le point sur les perturbations en cours et les nombreuses dégradations qui sont à déplorer.

Je le redis, ces violences sont inacceptables. Aucune cause ne justifie de s’en prendre aux biens et aux personnes, et je veux en particulier dire ma solidarité avec les agents des sociétés d’autoroutes, qui ont été la cible d’actions violentes et d’incendies.

Nous sommes et nous continuerons à être d’une fermeté totale envers ceux qui commettent de tels actes.
Nous sommes à quelques jours d’un week-end de grand départ, et nos concitoyens ont le droit de circuler librement sur le réseau autoroutier.

Pour ce faire, il faut que le calme revienne au plus vite sur le terrain. C’est ce pour quoi nous sommes totalement mobilisés, et c’est l’objet de la réunion de ce soir.

La réponse à la colère exprimée ces dernières semaines doit être collective ; les grandes entreprises doivent y prendre toute leur part.

(Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour la réplique.

M. Éric Bocquet.

Madame la ministre, j’entends bien votre réponse, mais nous restons, pour notre part, convaincus que la question de la maîtrise publique des infrastructures autoroutières se pose plus que jamais.

Les autoroutes françaises réalisent un chiffre d’affaires de 8 milliards d’euros par an. En privatisant, l’État a renoncé aux dividendes futurs estimés à 40 milliards d’euros d’ici à 2032. La marge nette des groupes autoroutiers oscille entre 20 % et 24 % depuis la privatisation. Enfin, 14,6 milliards de dividendes ont été distribués aux actionnaires.

Lors d’un débat au Sénat en 2014, sur l’initiative de notre groupe, nombreux ici furent les collègues sur toutes les travées à déclarer que la privatisation des autoroutes avait été une erreur. Nous pensons qu’il faut procéder à la renationalisation des concessions autoroutières.

L’emprunt à contracter serait remboursé par les bénéfices dégagés, et non pas par l’impôt. Il y va, selon nous, de l’intérêt général. Pour agir ainsi, les concessionnaires autoroutiers privés seraient-ils devenus un État dans l’État ?
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

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