Questions au gouvernement

Question écrite

Faim dans le monde

M. Éric Bocquet attire l’attention de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur la malheureuse progression de la faim dans le monde.

En effet, selon le rapport annuel de plusieurs organisations de l’organisation des Nations unies (organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, fonds international pour le développement de l’agriculture, fonds des Nations unies pour l’enfance - UNICEF -, programme alimentaire mondial et organisation mondiale de la santé - OMS), publié le 15 juillet, la faim dans le monde est en progression constante depuis trois ans maintenant. 821,6 millions de personnes étaient touchées par la faim en 2018, soit 11 millions de plus que l’année précédente. 149 millions d’enfants souffrent d’un retard de croissance.

Si l’on ajoute les populations souffrant de famine et les personnes qui sont touchées par l’insécurité alimentaire, le rapport considère que deux milliards de personnes (dont 8 % en Europe et en Amérique du nord) n’ont pas régulièrement accès à des aliments sains et nutritifs en quantité suffisante.

Le résultat de ce rapport est une « mauvaise tendance » comme a pu le souligner David Beasley, responsable du programme alimentaire mondial. La sous-alimentation n’a jamais été aussi importante et l’enjeu est donc de taille. Le rapport de l’ONU évoque les dérèglements climatiques et les conflits guerriers comme principales causes de cette progression.

Rien n’est donc inéluctable d’autant que dans le même temps, 1,6 milliard de tonnes de nourriture est perdu ou jeté chaque année dans le monde, soit un tiers de la production mondiale.

C’est pourquoi, il lui demande quelles sont les mesures que compte porter le Gouvernement à l’échelle internationale pour enrayer cette progression de la faim dans le monde et mieux, y mettre un terme dans un proche avenir.

Réponse de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères

Le rapport annuel sur « L’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde » (SOFI 2019) vient confirmer la trajectoire négative de ces dernières années, avec 820 millions de personnes, soit 11 % de la population mondiale, ayant souffert de la faim en 2018.

Élargissant pour la première fois son champ aux personnes en situation d’insécurité alimentaire modérée (qui ne souffrent donc pas de la faim mais ne sont pas certaines de pouvoir se procurer à manger et sont contraintes de réduire la qualité ou la quantité des aliments consommés), le rapport dévoile le chiffre alarmant cumulé d’un total de 2 milliards de personnes touchées, soit plus du quart de la population mondiale. Parallèlement, l’excès pondéral et l’obésité sont en progrès constant dans toutes les régions. Au-delà, le rapport examine cette année les effets des ralentissements de croissance et des fléchissements économiques sur la sécurité alimentaire et la nutrition des populations.

Le rapport appelle les pays à cibler les causes profondes de la faim et à mettre en oeuvre des politiques, à court et long terme, visant à sauvegarder la sécurité alimentaire et la nutrition. En outre, le SOFI 2019 confirme que, de façon paradoxale, les principales victimes de la faim restent les populations rurales et agricoles. C’est ce constat, déjà connu, qui conduit la France, à travers son action internationale et sa politique de développement, à œuvrer pour améliorer les conditions de vie de ces populations. Ainsi, la stratégie internationale de la France pour la sécurité alimentaire, la nutrition et l’agriculture durable, qui sera publiée à l’automne 2019, vise à favoriser des systèmes agricoles et alimentaires plus durables et plus nutritifs ainsi qu’à soutenir le développement d’une agriculture performante sur les plans économique, social et environnemental.

La bonne santé des exploitations familiales est un vecteur de cohésion et de stabilité : premier employeur dans le monde, ces exploitations produisent 80 % des denrées alimentaires mondiales, favorisent l’adaptation au changement climatique et contribuent également à lutter contre la pauvreté.

La France est très impliquée, y compris financièrement, dans les différentes instances de la gouvernance de la sécurité alimentaire mondiale, au premier rang desquelles les agences des Nations unies à Rome (FAO, PAM, FIDA), mais aussi au sein du G7-G20 ou d’autres initiatives telles que la Global Donor Platform for Rural Development (GDPRD).

La France s’efforce d’appuyer la coordination entre ces instances et le renforcement de la cohérence entre les actions.

Dans le cadre de la présidence française du G7, le groupe de travail Sécurité alimentaire du G7 s’est penché cette année sur la question de l’emploi décent des jeunes ruraux au Sahel. Reconnaissant que pour éliminer l’insécurité alimentaire, il est nécessaire de s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté dans la région, le G7 a jugé que la création d’emplois décents faisait partie des solutions permettant de réduire simultanément la pauvreté, l’insécurité alimentaire et la malnutrition. Le cadre du G7 pour l’emploi décent des jeunes ruraux au Sahel, élaboré par ce groupe de travail, propose une vision et des actions, à travers notamment une plus forte coordination des bailleurs du G7, un alignement avec les politiques nationales des pays du G5 Sahel, la promotion des systèmes alimentaires durables et d’une approche territoriale du développement.

La France dispose de plusieurs instruments financiers en faveur de la sécurité alimentaire et du développement agricole. L’action de l’Agence française pour le développement (AFD) est une composante essentielle de celle de la France ; ainsi, l’AFD a consacré en 2017 8% de ses engagements (soit 832 millions d’euros) à ces questions.
Pour renforcer la résilience des ménages ruraux vulnérables et lutter contre la malnutrition, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères dispose par ailleurs du dispositif de l’Aide alimentaire programmée (AAP), qui vise en particulier les zones délaissées et favorise le retour des populations vulnérables vers plus d’autonomie alimentaire, à travers des actions à la jonction entre développement et humanitaire.

Ce programme représentait en 2018 un budget de 33M€ et a été porté à 39M€ en 2019. Il suivra la même courbe ascendante en 2020 pour répondre aux besoins croissants des populations vulnérables.
À cela, on peut ajouter notamment les dispositifs en faveur de la société civile (conventions de partenariats pluriannuels).

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