Auditions en commissions

Commission des Finances - Audition

Projet de loi "Lutte contre la fraude" : Eric Bocquet intervient en Commission des Finances

Mercredi 6 juin, la Commission des Finances auditionnait Monsieur Bruno Parent, Directeur Général des finances publiques, et Madame Maïté Gabet, Cheffe du service du contrôle fiscal, dans le cadre de la présentation prochaine du Projet de loi Lutte contre la fraude, qui devrait arriver en juillet au Sénat.

Eric Bocquet les a interpellés au sujet des faiblesses qu’il a identifié dans le projet de loi qui sera prochainement présenté.

Merci Monsieur le Président,
Monsieur le Directeur général,

Je ferai également une remarque sur la liste des Etats et territoires non coopératifs, puisqu’évidemment, il reste des ambiguïtés, des insuffisances, certaines zones d’ombre.

Alors, le texte avance des critères :
Transparence fiscale mais bon, transparence fiscale quand on est en face d’un trust, jusqu’où ça va ?
L’équité fiscale, est-ce qu’on pourrait définir cette notion de manière plus fine ?
Troisième critère évoqué : mise en œuvre des mesures anti-BEPS, ok très bien, mais je crains que cela reste assez général quand même.

La deuxième ambiguïté, c’est sur : comment se fait-il qu’il y ait plusieurs listes, au monde, des Etats et territoires non coopératifs ? Il y a la liste du GAFI, l’OCDE en produit une autre, l’Union Européenne en produit une autre, nous encore une autre… et il n’y a pas les mêmes Etats. Donc déjà là, ça fait plusieurs trous dans le bouclier à mon avis. Si on est tous d’accord à l’échelle mondiale pour combattre ce fléau, eh bien on a une définition, et on a une liste. Ça, à mon avis, c’est une sacrée faiblesse.

Et d’emblée, au lendemain des révélations des Paradise Papers l’an dernier, le Commissaire Européen, Monsieur Moscovici avait fait des déclarations très claires, très péremptoires, « on va voir ce qu’on va voir, vous allez voir, on va sortir une liste, ça va saigner ». On a attendu le 5 décembre et puis ça a fait flop. Parce que d’emblée, on excluait que sur cette liste figure aucun Etat membre de l’Union Européenne. Exit Chypre, exit Malte, où des questions se posent quand même ; exit même le Luxembourg, qui a signé depuis les affaires Luxleaks 172 rescrits fiscaux. En avez-vous connaissance ? En connaissez-vous la teneur ?

Donc d’emblée, on se met en situation de faiblesse. En face, ils sont costauds, ils sont unis. Et je pense qu’il y a des nécessités de clarifier les critères, établir une liste vraiment crédible. Je pense qu’aujourd’hui, elle ne l’est pas cette liste.

Après, l’aggravation des sanctions, très bien, de 500 000 à 2 millions d’euros, c’est ce chiffre qui a été fixé. Mais quand je vois que la banque HSBC accepte en novembre dernier de payer 300 millions d’euros en ayant soustrait au FISC 1,6 milliard, en reconnaissant les faits, en gros « je suis coupable mais s’il vous plaît, ne me faites pas de procès », parce qu’il y a 2 points faibles : il y a l’argent, le porte-monnaie bien sûr, mais il y a la réputation qui compte beaucoup pour les banques, ça ils sont très sensibles à ça. Donc en gros, j’achète de ne pas aller en procès. Est-ce que c’est entendable vis-à-vis de l’opinion publique ? Le projet de loi doit d’abord avancer l’intérêt général évidemment, et aussi redonner confiance, c’est ce que notre rapporteur général évoquait, la confiance.

Voilà, 300 millions d’euros et je m’en sors, ça créé un trouble dans l’opinion pour dire le moins, et ce n’est pas ça qui est de nature à rassurer et à restaurer la confiance de l’opinion par rapport à ça. Et ça passe très mal, et on peut comprendre et je comprends que ça passe très mal.
Donc est-ce qu’il n’y a pas là une deuxième faiblesse très dommageable dans ce texte ?

Vous pouvez retrouver l’audition dans son intégralité sur le site du Sénat.

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