Lors du débat budgétaire, il y eut une discussion sur le « prix de transfert ». C’est une notion technique un peu complexe que j’ai tenté d’expliquer lors de la séance à propos d’un amendement.
Cette pratique des prix de transfert est courante au sein des grands groupes internationaux. Ceux-ci disposent de nombreuses filiales et notamment très souvent dans les paradis fiscaux, ces territoires à fiscalité faible ou nulle.
La maison-mère reçoit de ses filiales paradisiaques des factures pour des opérations fictives, elles profitent ainsi de la fiscalité avantageuse de ces pays. J’ai choisi le cas de la banane, le fruit le plus consommé au monde, pour illustrer mon propos. Le négoce de la banane dans le monde est le fait de 3 grands groupes multinationaux, Fresh Del Monte, Chiquita, Dole. Imaginons une banane produite au Costa Rica, 50% de son prix de vente finira dans les paradis fiscaux. Par quel mécanisme, voici !
Le coût de production de la banane est de 0,13€ avec 0,1 de bénéfice imposable. Une filiale implantée aux Îles Caïmans facture à la maison-mère 0,08€ pour utilisation du réseau d’achat. Ensuite, direction l’Europe, au Luxembourg (0% d’impôt-société pour les holdings), facturation de 0,08€ pour usage des services. Puis l’Irlande (taux d’impôt 12,5%), la marque y est enregistrée, facturation pour usage de la marque, 0,04€. Passage à l’Île de Man, frais d’assurance, 0,04€. Direction Jersey (taux d’impôt société 10%), facturation pour management de l’entreprise et différents services juridiques, 0,06€. Enfin, retour aux Caraïbes, aux Bermudes exactement pour la facturation du transport de la banane à la maison-mère, 0,17€. Nous en sommes à un prix de revient de 0,60€.
Le grossiste et le détaillant ajouteront leurs marges et vous obtiendrez le prix de vente au consommateur. Ce voyage fictif fait gagner aux grands groupes 50%... Cela s’appelle du commerce intragroupe, il représente la majorité des échanges commerciaux mondiaux.
Ce système fait de Jersey le 1er exportateur de bananes en Europe. En effet, à Jersey, ils ont la banane !
