Chroniques

Dans les griffes du Lion…

Déplacement cette semaine dans le Doubs pour parler milliards, visite dans le Pays de Montbéliard à Audincourt, ville tout juste limitrophe de Sochaux, cœur historique du groupe Peugeot. L’occasion de rencontrer un salarié du groupe, « la Peuge » comme il dit.

Notre ami décrit sa journée de travail ; il s’appelle Jérôme. Un entretien passionnant. Il me raconte qu’il embauche à 5 heures du matin, son poste l’amènera jusqu’à 12 h 40. Entre temps, trois pauses, successivement 9 minutes, 11 minutes et 20 minutes enfin pour la « pause déjeuner ».

Son métier, contrôleur qualité, l’œil humain qui doit repérer sur les véhicules, rayures, griffes, défauts divers. Il voit passer 60 véhicules à l’heure, ou un par minute, 420 sur l’ensemble du poste. Il faut rester concentré, et là on imagine Charlie Chaplin dans Les Temps modernes (1936) courant derrière les pièces pour rattraper son retard, ici ce n’est pas de la comédie.

Sur le site de Sochaux, il y avait 12 000 salariés il y a dix ans, ils sont 6 500 aujourd’hui, dont 900 intérimaires et il s’y produit le même nombre de véhicules par jour. Robotisation, optimisation, rationalisation… l’homme n’est plus qu’un rouage de cette chaîne de production, rien de nouveau sous le soleil capitaliste.

Sur la chaîne passent les modèles différents, 2008, 3008… chaque salarié doit adapter son geste à chaque modèle, le même temps est prévu pour effectuer sa tâche. Le salaire moyen dans l’usine se situe aux environs de 1 350 euros, des primes tombent de temps en temps, le montant des primes dépend entre autres de votre assiduité, chaque absence, même justifiée, entraîne automatiquement une perte de points, donc d’argent. À partir de 50 ans, votre productivité faiblit, vous êtes fatigué, physiquement, psychologiquement, là-haut, à cet âge-là, on commence à réfléchir à votre « sortie »…

Jérôme nous explique que la direction envisage d’investir dans des robots pour effectuer cette mission de « contrôle qualité », capteurs, robots qui seront plus efficaces que l’œil humain pour détecter les défauts sur les véhicules, c’est effrayant !

En janvier 2021, Peugeot est devenu Stellantis après la fusion avec Fiat-Chrysler, c’est à ce moment-là que Carlos Tavarès (le psychopathe de la performance) décide de transférer le siège social du groupe aux Pays-Bas. Pour les moulins, le gouda, les tulipes ? Non, pour des raisons fiscales. L’impôt sur les sociétés aux Pays-Bas est compris entre 19 % et 25 % et puis « le droit des sociétés néerlandais est plus flexible que le droit français », nous explique un avocat d’affaires.

Je ne sais pas si Jérôme est allé à Amsterdam, un jour.

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