Chroniques

Perfide Albion ?

La chronique d'Eric Bocquet - Vendredi 25 octobre 2019

C’est parfois l’expression que l’on entend pour désigner nos voisins d’Outre-Manche. Ah ces Anglais ! Voilà aujourd’hui qu’ils ont décidé de quitter l’Union européenne. Quelle audace ! Quelle impudence ! Voilà trois ans et demi que l’on entend parler du fameux « Brexit ».

Ainsi le peuple britannique a-t-il décidé démocratiquement de quitter l’Union européenne en juin 2016. Le résultat fut sans appel : 72% de participation, soit 33,5 millions d’exprimés, avec 17,4 millions de voix pour la sortie (leave) 51,2% et 16,1 millions de voix pour rester au sein de l’UE (remain) et 48,1%. Ce fut un séisme pour le pays et pour l’Union européenne.

Ce qui m’étonne dans les analyses, c’est que l’on n’a jamais entendu personne analyser les causes d’un tel choix du peuple. Si l’on jette un coup d’œil à la carte des résultats, on s’apercevra très vite de la corrélation avec la situation économique et sociale des différentes régions du Royaume-Uni. En gros, là où il y a prospérité économique, relative richesse et chômage moindre, on a fait le choix de rester dans l’UE mais l’exact inverse est vrai en ce qui concerne les résultats en faveur de la sortie. Il est donc tout à fait réducteur de ramener ce résultat à un vote xénophobe, c’est bien à nouveau l’Europe libérale qui est en cause fondamentalement.

Il serait donc sacrilège de contester cette construction européenne ! Nous le fîmes, en France le 29 mai 2005 et le monde ne s’est pas écroulé le lendemain.

Au moins, on ne peut reprocher au gouvernement britannique de ne pas respecter le vote souverain du peuple. Evidemment, le pays vit une crise politique majeure depuis cette date de juin 2016. Il y a juste un secteur qui n’est pas trop inquiet, c’est celui de la finance.

Des experts avaient prédit la délocalisation de 30 000 emplois de l’industrie financière de Londres vers les autres capitales européennes, il n’en fut rien, ce chiffre s’est arrêté à 1 000. Et puis il y eut les déclarations successives des ministres britanniques, Theresa May : « Nous allons faire du Royaume-Uni le meilleur endroit au monde pour faire des affaires » ; Boris Johnson, il y a quelques semaines : « Nous allons tirer avantage de toutes les libertés que le Brexit peut apporter, un nouveau régime fiscal pour l’investissement (traduire moins d’impôts), créer des ports francs et de nouvelles zones économiques ». Et puis ces mots du ministre des Finances (appelé Chancelier de l’Echiquier) Philip Hammond, qui pousse avec d’autres l’idée de faire du Londres d’après Brexit un «  Singapour sur Tamise » avec peu d’impôts, peu de régulation, une fiscalité attractive pour séduire les fortunes du monde… Bref, tout cela ressemble fortement à un paradis fiscal au cœur de l’Europe.

Et le peuple britannique, il en pense quoi ?

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