À la tribune

Territoires zéro chômeur de longue durée

La droite sénatoriale dénature une proposition de loi attendue

Le mardi 13 octobre 2020 était discutée au Sénat la proposition de loi relative au renforcement de l’inclusion dans l’emploi par l’activité économique et à l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée ».

Découvrez l’intervention générale du groupe CRCE sur ce texte, ainsi que les défenses d’amendement de Michelle Gréaume.

C’est tout d’abord Laurence Cohen qui s’est exprimée au nom du groupe CRCE, pour l’intervention générale sur le texte.

Lire l’intervention générale

Monsieur le Président,
Madame la Ministre,
Mes cher·es collègues,

En 2016 notre groupe avait voté en faveur de l’expérimentation territoriale Zéro chômeurs de longue durée, portée par de nombreuses associations, tout en rappelant que seule une politique publique ambitieuse apporterait une solution globale.

Depuis 2016, le contexte a été profondément bouleversé par la crise sanitaire due à la pandémie de la Covid-19 et surtout par ses conséquences économiques avec 800 000 personnes supplémentaires au chômage qui s’ajoutent aux 2 millions de personnes déjà éloignées de l’emploi avant cette crise sanitaire.
Parmi ces 2 millions de personnes éloignées de l’emploi on retrouve des profils très différents, puisqu’il s’agit de chômeur.ses de longue durée mais également de chômeur.es en situation de handicap, de bénéficiaires des minimas sociaux ou encore de parents isolés.

Dès lors l’expérimentation territoire Zéro chômeurs ne peut être qu’un outil entre les mains des collectivités territoriales pour accompagner celles et ceux qui continuent d’être au chômage de longue durée.

420 personnes ont pu bénéficier de l’expérimentation, ce dont nous pouvons nous réjouir même si c’est un tout petit pas face à l’ampleur du phénomène.

Mais les initiatives locales ne peuvent remplacer une politique de l’emploi ambitieuse permettant d’évoluer dans sa vie professionnelle, selon ses aspirations, sans perte de revenu et sans jamais passer par la case « chômage ».

C’est ce que nous portons au groupe CRCE avec notre proposition de sécurité d’emploi ou de formation.
Ainsi, dans le cadre d’un nouveau service public de l’emploi et de la formation, auquel toute personne ayant fini sa scolarité serait affiliée de droit, chacune et chacun pourrait alterner périodes de travail salarié et périodes de formation rémunérées, en s’appuyant sur une réduction générale du temps de travail rendue possible par les gains de productivité qu’apportent les nouvelles technologies.

Ce n’est malheureusement pas la voie empruntée par le gouvernement qui a prévu, dans son plan de relance de 100 milliards d’euros, seulement 200 millions d’euros pour le soutien aux personnes précaires, soit 0,2% du plan de relance consacré à assurer la cohésion de la nation en luttant contre la précarité.
Cette proposition de loi des député·es « La République en Marche » recycle les dispositions du gouvernement issues de la loi Avenir Professionnel de 2018.

Ce qui en fait un projet de loi déguisé puisqu’en réalité le gouvernement annonce reprendre dans ce texte les annonces du Président de la République qui s’était engagé à créer 100 000 emplois dans le secteur de l’inclusion par l’activité économique.

Or le texte proposait justement de supprimer l’agrément de Pôle emploi pour l’embauche de personnes par les structures de l’insertion.

En retirant l’agrément de Pôle emploi ce n’est pas l’accès qui sera facilité pour les personnes éloignées de l’emploi mais bien la perte d’une connaissance de l’accompagnement vers le retour en emploi et surtout la disparition d’un service public national seul à même de garantir l’égalité d’accès sur l’ensemble du territoire.

L’écart entre les paroles et les actes du gouvernement se constate malheureusement chaque jour, et cette proposition de loi LREM le démontre une fois de plus.

Le gouvernement prétend sortir les personnes de la précarité mais sa majorité propose à l’article 7 de supprimer l’application du bonus-malus sur les cotisations d’assurance chômage en cas de recours abusif à de l’emploi court.

La droite sénatoriale va encore plus loin en faisant disparaitre tout malus des contrats courts.
Autrement dit les employeurs sont invités à recruter en contrats précaires y compris les séniors pour lesquels est créé un CDI au rabais. Les personnes auront le choix désormais entre la précarité en dehors de l’emploi ou la précarité dans l’emploi.

Avec ce texte, c’est la nature même du secteur de l’inclusion par l’activité économique et des expérimentations territoires zéro chômeur qui est remis en cause, puisqu’il s’est construit autour de l’idée selon laquelle il faut s’appuyer sur le potentiel de chaque personne.

Mes Cher·es Collègues, nous savons toutes et tous que la persistance du chômage de longue durée n’est pas une responsabilité individuelle mais le résultat du système économique et social.

Ce qui est forcément contradictoire avec l’article 8 qui prolonge l’expérimentation du renforcement des contrôles sur les chômeurs dans leur recherche d’emploi et contradictoire avec l’article 9 qui vise à responsabiliser les salarié·es en utilisant leur compte personnel de formation avant toute prise en charge financière des régions ou de Pôle emploi.

La droite sénatoriale pense que le cumul contrat d’insertion et contrat à temps partiel de moins de 20 heures, va permettre de sortir les personnes de la précarité, ce n’est pas notre avis.

Pour l’ensemble de ces raisons, et malgré notre soutien à l’expérimentation zéro chômeur dans les territoires, nous voterons contre cette proposition de loi dénaturée par le gouvernement et par la droite sénatoriale.


Michelle Gréaume a défendu l’amendement 41 sur l’article 1er, relatif au pouvoir de contrôle des demandeurs d’emploi.

Lire la défense d’amendement 41 sur l’article 1er

Merci madame la Présidente,
Madame la ministre,
Mes cher.es collègues

La proposition de loi dessaisit Pôle emploi de son pouvoir de contrôle des demandeurs d’emploi au profit d’un prescripteur dont la nature n’est pas précisée. Selon nous, le contrôle, même a posteriori, doit demeurer un contrôle public afin d’éviter d’éventuels conflits d’intérêts entre plusieurs structures privées.

Madame la ministre du travail a affirmé à nos collègues députés que demain, grâce à cette précision inscrite dans le texte, le diagnostic pourrait être établi soit par des prescripteurs habilités, dont Pôle emploi, soit par les structures d’insertion par l’activité économique, qui ont accompagné le salarié depuis son entrée dans le parcours. Puisque nous partageons le même résultat, nous invitons Madame la ministre à soutenir notre amendement, précisant simplement que l’établissement public Pôle Emploi à caractère administratif contrôle les demandes d’emploi dans le cadre de sa mission d’accompagnement au retour à l’emploi.

Tel est le sens de notre amendement de précision.


Elle a ensuite défendu l’amendement 38 sur l’article 9, portant sur

Lire la défense d’amendement 38 sur l’article 9

L’article 9 reprend une mesure introduite au moment de la loi « Avenir professionnel » du 5 septembre 2018 à laquelle nous nous étions opposés.
La mobilisation du compte personnel de formation (CPF) des demandeurs d’emploi devient automatique en cas de formation financée par Pôle Emploi ou la Région. Cela signifie que les demandeurs d’emploi seront contraints de puiser dans leurs droits acquis au titre du CPF pour financer une formation dans le cadre de leur retour à l’emploi.
Avant la réforme de la formation, un travailleur privé d’emploi avait toujours la possibilité de refuser que l’on puise dans son CPF. Cette disposition entretient donc une confusion dangereuse, entre ce qui relève de la responsabilité individuelle et ce qui relève de celle de la puissance publique.
Elle marque le désengagement de l’Etat dans l’accompagnement des personnes privées d’emploi, tout en constituant un détournement du CPF, qui selon nous doit rester un outil de formation individuelle pour le ou la salarié.e. Pour cette raison, nous demandons la suppression de l’article.


Pour aller plus loin, le dossier législatif est à consulter sur le site du Sénat.

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