À la tribune

Intervention générale d'Eliane Assassi sur le pass vaccinal

Position du groupe CRCE sur le Projet de loi Gestion de la crise sanitaire

Mardi 11 janvier 2022, le Sénat débutait l’examen du Projet de loi "Gestion de la crise sanitaire", visant à instaurer un pass vaccinal dans l’espace public.

Eliane Assassi, Présidente du Groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste, a prononcé l’intervention générale à la tribune sur ce texte.

Lire le texte de l’intervention d’Eliane Assassi

Monsieur le Président,
Messieurs les ministres,
Mes chers collègues,

Alors que nous avions du mal à croire à une seconde vague en 2020, nous voilà début 2022, en pleine pandémie et notre peuple fait face avec courage mais aussi lassitude et résignation.

Oui, il faut lutter frontalement contre l’épidémie, oui il faut vacciner et protéger la population. Mais deux ans après le début de l’épidémie, vous ne pouvez plus dissimuler la réalité : c’est l’insuffisance de moyens de la santé publique qui pousse à la mise en œuvre de politique autoritaire, de contraintes qui portent lourdement atteinte aux libertés publiques.

C’est l’hôpital public, la médecine de ville mais aussi l’Assurance maladie qui sont défaillants, non pas du fait d’un personnel qui est exemplaire de dévouement et de courage, mais du fait des choix libéraux de ces dernières années, maintenus malgré la pandémie, par E. Macron et votre gouvernement.
Nous ne sommes pas d’accord avec votre stratégie du rideau de fumée.

Vous masquez par des mesures coercitives, comme le passe sanitaire puis le passe vaccinal, par l’état d’urgence permanent, l’incurie d’un système qui a ravalé la santé au rang de marchandise.

Je le souligne d’emblée, si le passe sanitaire a boosté la vaccination, force est de constater qu’il n’a pas ralenti la propagation du virus. Pour preuve, 300.000 personnes sont testées positives par jour, quelle est donc l’utilité de ces sésames ?

Ce rideau de fumée, c’est aussi l’agression verbale du Président de la République contre des millions de personnes non vaccinées dont beaucoup ne le sont pas par choix, mais par éloignement, faiblesse ou incompréhension.

Quelle est cette France où l’on sonde les gens pour savoir si les soins doivent toujours être accordés à ceux qui refusent le vaccin ? Oui, vous fabriquez des parias pour détourner le débat et nous dénonçons ce jeu dangereux.

Nous proposerons par voie d’amendement et cela en préalable à la discussion du texte, que l’entrée en vigueur du passe vaccinal soit conditionnée à la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport sur l’impact et sur le recul de la propagation de l’épidémie de Covid-19. Car si, comme je l’ai dit, ce passe a pu être utile, faute de politique de santé publique efficace pour inciter à la vaccination, l’on peut aujourd’hui se demander ce qui légitime sa prolongation et son durcissement.

Instrument auquel s’ajoute celui d’un traçage numérique étatique banalisé qui tend lui-même à s’amplifier et se durcir comme le propose l’article 2 du texte, en étendant l’accès aux données personnelles médicales aux services préfectoraux.

Il est temps de mettre fin à ce système de passe inutile sur le plan sanitaire, et dangereux sur le plan des libertés publiques.

Bien d’autres solutions sont possibles : des solutions d’ordre véritablement sanitaire et non sécuritaire, comme l’accentuation des gestes barrières et des moyens de lutter contre la propagation : le déploiement des purificateurs d’air (notamment dans les salles de classe), distribution de masques FFP2 (plus efficaces face à Omicron), l’effectivité du recours au télétravail, lorsque cela est possible. Ou encore, l’organisation de roulements dans les entreprises ou dans les établissements scolaires par exemple. Plus globalement, il s’agirait, comme nous avons de cesse de le soutenir : d’investir davantage dans la médecine de ville et la médecine scolaire et de réarmer l’hôpital public.

En bref, des mesures pratiques qui répondent à la crise sanitaire en souhaitant protéger nos concitoyens et non les punir !

Enfin il ne s’agit pas d’une épidémie mais bien d’une pandémie, la question est donc mondiale et la seule réponse efficace sera de cet ordre : c’est pourquoi je le redis, il est plus urgent que jamais de lever les brevets sur les vaccins pour éviter l’émergence de nouveaux variants. Seuls 50% de la population mondiale est vaccinée. Un plan de vaccination massif dans le monde doit être déployé.

Plutôt que de taper du poing sur la table en insultant toute une partie de nos concitoyens, Emmanuel Macron aurait tout intérêt à profiter de la présidence française de l’Union européenne pour convoquer un sommet international et engager un bras de fer salutaire autour de la levée des brevets sur les vaccins et d’un gigantesque effort d’aide au développement. En France nous avons débloqué des centaines de milliards pour l’économie, combien pour la santé ? Combien pour la solidarité internationale ?

Mes chers collègues, monsieur le ministre, vous en conviendrez, nous sommes prêts à être force de proposition et à débattre des mesures propres à gérer la crise sanitaire.

Mais pour l’heure, malgré les tentatives du Rapporteur de la commission des lois pour atténuer certaines mesures, nous nous opposons à cet énième projet de loi sécuritaire et d’intimidation, d’infantilisation de nos concitoyens et de déresponsabilisation de nos dirigeants.

E. Macron, le 12 mars 2020, avait annoncé extraire la santé de la loi du marché. Or, il fait aujourd’hui payer à notre peuple dans son quotidien, par ses décisions solitaires, le refus de s’attaquer aux dogmes libéraux qui étouffent l’hôpital, la santé et notre pays. Nous refusons cette impasse sanitaire mais aussi démocratique.

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