Auditions en commissions

Audition de M. Jean Arthuis, président de la commission sur l'avenir des finances publiques

Réduire la dépense, sans envisager d’augmenter les recettes : Eric Bocquet commente le rapport de la commission sur l’avenir des finances publiques

Ce mercredi 24 mars 2021, la Commission des Finances procédait à l’audition de M. Jean Arthuis, président de la commission sur l’avenir des finances publiques.

Eric Bocquet est intervenu pour l’interroger sur les alternatives qui s’offrent à la maîtrise des dépenses publiques, comme elle est envisagée dans le rapport de la commission, alors qu’une hausse des recettes, et particulièrement en ce qui concerne les "grands gagnants" de la crise n’est pas envisagée.

Lire le texte de l’intervention

Merci monsieur le Président.

J’ai eu deux brefs moments d’espoir à la lecture de votre rapport, Monsieur le Président.
(rires autour d’Eric Bocquet)

Quelques secondes. La première quand vous dites « écarter l’austérité ». On ne peut qu’applaudir à cette formulation. Et « accroître les prérogatives du parlement », j’en conviens tout à fait, nous sommes insuffisamment associés à cette histoire de dette, et même des finances publics.

Mais vous dites « il ne faut pas s’engager dans un programme de réduction des dépenses dès maintenant ». Et c’est le « dès maintenant » qui m’inquiète. Dès lors que vous écartez tout nouvel impôt - enfin, vous, le Gouvernement, j’entends, c’était la commande de votre rapport – en gros, aucune alternative. Donc on revient au fameux TINA des années 80, il n’y a pas d’alternative. (There Is No Alternative, formule célèbre de Margaret Thatcher, ndlr)

La seule voie possible, dites-vous, c’est la maitrise des dépenses. Et j’ai ici le rapport Pébereau de 2005, qui eut la même mission en son temps. Et il disait en 11ème proposition : « Faire de la réduction des dépenses inefficaces la priorité du Gouvernement et du Parlement, pendant la phase de retour à l’équilibre ». C’était il y a 16 ans, nous sommes exactement dans le même cadre.

Et pourtant cette dépense publique a été l’un des leviers, si ce n’est LE levier principal pour éviter l’effondrement complet de l’économie, et même de la société, j’irai jusque-là.

Alors, sur la dette, vous dites « la dette c’est l’accumulation des déficits annuels depuis 46 ans ». Mais un budget, c’est aussi des recettes effectivement. Or, ce point recettes n’est pas du tout évoqué dans le rapport. Alors qu’il y a eu des gagnants dans cette crise, il y a quand même eu des gagnants. On peut parler des GAFA, on peut parler de la grande distribution, des assureurs, etc… Et on est toujours sur la problématique de mettre sur le même plan, un Etat et un ménage vis-à-vis de la dette, alors que ce n’est pas comparable, chacun le sait.

Parce que sur les recettes, on pourrait aussi imaginer une analyse fine de tout ce qui est exonérations, dégrèvements, l’évasion fiscale qui reste un sujet, les niches, voilà autant de sujets qu’il faudrait je crois examiner de près, pour avoir une analyse un peu plus équilibrée des matières budgétaires.

Sur les alternatives en matière de gestion de dette, le rapport passe, je trouve, assez rapidement, sans véritable démonstration. Vous dites quand même « nous les avons finalement écartées, ces options », est-ce à dire qu’il y a véritablement eu un débat au sein de la Commission sur ces aspects ?
Vous dites « le cantonnement, ou la dette perpétuelle, ou l’annulation inquièteraient les marchés financiers », qui ne sont nullement inquiets aujourd’hui. On le constate avec les taux négatifs qu’ils nous proposent, et même dans certains cas un endettement à 50 ans, ce qui est tout à fait nouveau. Donc pas d’inquiétude de ce côté-là.

Débat sur la dette, vous dites dans le rapport, et c’est vrai, une écrasante majorité des Français considère en effet qu’ils sont mal informés sur la dette publique. Je pense qu’effectivement, c’est l’un des enjeux du débat démocratique du moment.

Les règles européennes, elles ont explosé, c’est évident. Tant du point de vue du déficit que du niveau d’endettement, et y compris de beaucoup de pays du bloc européen. Elles sont devenues caduques, mais quelles propositions feriez-vous en matière d’évolution des règles européennes ?

N’est-ce pas le moment de revoir fondamentalement le mandat de la BCE ? Qui a d’ailleurs joué un rôle nouveau depuis plusieurs années, avant même cette crise de Covid, avec l’assouplissement quantitatif, les mesures non-conventionnelles, elle est sortie de son cadre. Ne peut-on pas réfléchir à lui faire jouer un autre rôle, en termes d’interventions directes ? La Réserve Fédérale Américaine l’a fait, la Banque d’Angleterre, dès le mois d’avril 2020, l’a fait. Directement, financement des Etats, je pense qu’il y a matière à débat sur le sujet.

Finalement, le rapport retient comme objectif central de faire baisser le niveau de la dette à partir de 2030, en limitant la croissance des dépenses publiques à 0,65% par an en volume. Nous étions à 1,3 en objectif en moyenne entre 2009 et 2019.

Donc réduire les dépenses publiques, et là je vais rejoindre Jérôme Bascher, lesquelles ? Concrètement ? L’hôpital ? L’éducation ? La justice ? Le niveau des retraites ? etc… Si on veut aller jusqu’au bout.

Dernière remarque, boussole, vigie, compteur, … Moi j’avais déjà l’impression que dans ce pays, on avait tout un tableau de bord pour gérer les finances publiques. Merci.


Pour visionner la réponse collective prononcée par Jean Arthuis, cliquez sur ce lien (site du Sénat).

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